Table ronde avec Jean-Claude Lapraz au Colloque « Pharmacie 3.0 » – 2 avril 2015
Jean-Claude Lapraz participait le 9 novembre aux 4e Assises de l’innovation thérapeutique, manifestation placée sous le parrainage du Secrétariat d’État à l’Enseignement supérieur et à la Recherche.
Voici le texte de son intervention durant la table ronde « Quelle chaîne de valeur à l’heure de l’industrie 4.0 ? »
Jacques MARCEAU animateur de la table ronde :
L’innovation ne vient pas uniquement de progrès industriels issus de la recherche permettant de mettre à jour de nouvelles molécules, de nouvelles approches thérapeutiques à travers de nouvelles formules. L’innovation vient aussi du service. Le comportement est l’un des fondamentaux. Mais on peut être atteint d’une maladie qui n’a rien à voir avec le comportement. Après avoir évoqué la médecine régénérative, la médecine prédictive, la médecine préventive, de nouvelles approches thérapeutiques, nous allons nous arrêter sur une approche peut-être plus triviale avec Jean-Claude Lapraz qui travaille sur l’endobiogénie. Cette technique est basée sur des algorithmes et une analyse prédictive à partir du bilan biologique.
Une nouvelle approche : l’endobiogénie
Jean-Claude LAPRAZ, président et fondateur, Société Internationale de Médecine Endobiogénique et de Physiologie intégrative (SIMEPI)
45 ans de pratique de la médecine générale, dont 7 années à l’hôpital Boucicaut (Clinique Chirurgicale Générale et Oncologique. Pr Reynier, AP-HP, Paris).
Dès le début de mon installation m’est apparue la nécessité de définir une approche intégrative de l’être humain qui s’efforce de comprendre comment il se gère dans une dynamique permanente, à la fois par rapport à lui-même, à la maladie et à son environnement.
La démarche intégrative que nous proposons a donné naissance à des travaux qui se développent au plan international (États-Unis, Mexique, Lituanie) à travers des équipes pluridisciplinaires, et plus récemment en France.
Pour une physiologie intégrative en médecine
L’évolution actuelle de la médecine insiste sur la nécessité de replacer le malade au centre du système de soins et d’élargir la vision qui a prévalu jusqu’ici et qui a dissocié la maladie de la spécificité du sujet qui l’exprime. Cette obligation de ne plus considérer la maladie comme une entité autonome est apparue de plus en plus évidente du fait des découvertes de la génétique qui ont clairement mis en évidence le rôle fondamental du génome du patient dans son lien avec les pathologies qu’il exprime. La vision génomique de la maladie établit des relations étroites entre les gènes et la prédisposition à développer certaines maladies et permet d’adapter de façon plus précise le traitement d’un patient grâce au ciblage moléculaire de la
molécule utilisée pour traiter l’anomalie génétique.
Malgré les progrès de plus grande efficacité thérapeutique qu’une telle approche de la réalité permet d’obtenir, en réduisant le sujet à son seul génome et en ne l’abordant pas dans la globalité de ses propres fonctions et de ses relations avec le monde, elle butte sur les limites d’une vision essentiellement analytique.
L’épigénomique, à savoir l’étude des phénomènes qui modifient l’expression des gènes, montre clairement que cette vision génomique réductionniste de la maladie doit s’ouvrir sur une compréhension plus large en éclairant les relations existant entre génome et environnement.
L’objectif que poursuit l’endobiogénie est de proposer une compréhension originale des mécanismes physiologiques à l’oeuvre dans le vivant. Ces mécanismes doivent être intégrés sur un mode de fonctionnement dynamique dans une approche unifiée du sujet, partant de l’expression du potentiel génétique abordé à la fois dans ses relations à la vie nucléaire, cellulaire, tissulaire et à celle des organes en eux-mêmes et dans leurs relations fonctionnelles rapportées à l’ensemble de l’organisme.
Cette vision intégrée du vivant se fonde sur les notions de globalité, de système, d’interrelation de systèmes, de dynamique et de relativité. Elle impose que le patient, et non pas la seule maladie, soit replacé au centre de la réflexion diagnostique. Celui-ci doit être abordé dans sa réalité physiologique personnelle et dans sa relation à son milieu, quels qu’en soient les aspects : hygiéno-diététiques, cosmo-telluriques, émotionnels, affectifs, socioculturels, économiques, etc. Il s’agit alors d’intégrer l’ensemble des systèmes et de ne pas se borner à une approche éclatée de l’individu.
L’organisation des systèmes vivants
Les systèmes fonctionnels auto-organisés, tel le corps humain, sont organiquement fermés mais fonctionnellement ouverts. La biologie des systèmes impose la nécessité d’identifier quel est celui qui est capable de faire l’intégration du gène à la cellule, aux tissus, à l’organe, à l’organisme considéré comme un tout, non seulement dans sa relation en lui-même, mais aussi dans les relations verticales, horizontales et radiaires de chacune des parties du système. Tous ces niveaux sont forcément intégrés dans une dynamique permanente du vivant. Ils ne sont pas figés, et seule la compréhension des mécanismes de la vie propre de l’individu peut apporter une vraie compréhension de son état de santé, de la genèse de ses
pathologies et de leurs causes réelles.
La biologie intégrative
S’inscrivant dans une telle approche, l’endobiogénie propose un modèle de simulation biologique de ce fonctionnement unifié en définissant le gestionnaire de l’intégration : le système endocrinien.
Par l’intermédiaire d’algorithmes basés sur la physiologie, la méthode scientifique que nous proposons permet d’évaluer quantitativement le fonctionnement des axes endocrines à divers niveaux (endocrine, métabolique, tissulaire, organique) et d’établir un profil physiologique unique pour chaque patient.
Concrètement, ce système algorithmique permet de remonter en amont de ce qui se trouve dans le sang circulant, qu’il s’agisse d’éléments figurés (globules rouges, blancs, etc.) ou de protéines, d’enzymes, etc
Ces produits du métabolisme impliquent que leur gestion soit assurée par un régulateur capable d’intégrer, à tout instant et en tout lieu, chaque élément de l’ensemble : du niveau le plus infra structural à celui global d’un être inséré dans son milieu et en relation avec ce milieu. Il n’existe qu’un système dans le corps humain qui soit capable de gérer cette intégration à tous les niveaux, y compris d’assurer l’intégration du génome : c’est le système hormonal.
Une simple prise de sang
Le système est simple dans son principe. Par exemple, à partir d’une prise de sang, le médecin peut constater s’il y a trop ou pas assez de globules rouges ou de globules blancs, et définir une pathologie : anémie, ou présence d’une infection.
Cette vision purement analytique ne remonte pas en amont, au niveau du gestionnaire endocrine : le système qui fait l’intégration des systèmes et des fonctions qui ont participé à la synthèse de ces éléments mesurés dans le sang circulant. Or de très nombreuses publications scientifiques internationales nous apprennent que les androgènes sont responsables de la production des globules rouges et que les globules blancs sont sous contrôle des œstrogènes. Un premier ratio globules rouges/ globules blancs va donc donner une idée de la façon dont fonctionne en amont le gestionnaire endocrine en ce qui concerne la relation entre l’activité des androgènes par rapport aux œstrogènes au niveau des effecteurs de la moelle osseuse qui vont produire ces éléments figurés présents dans le sang.
Ce ratio GR/GB permet de définir une fonction qui évalue, à partir d’une simple prise de sang, une activité tissulaire précise du gestionnaire endocrine, dénommée ici « index génital , et quantifie l’activité des androgènes par rapport à celle des œstrogènes dans leurs effets tissulaires. D’autres algorithmes, conçus selon ce même processus, ont été établis et évalués depuis de nombreuses années et figurent dans le modèle de simulation que nous proposons à la communauté scientifique (Endobiogeny : a global approach to systems biology. Lapraz JC, Hedayat KM, Pauly P. Global Advances in Health and Medicine. January – 2013).
Actuellement, nous développons divers travaux en collaboration avec des équipes de recherche, en cardiologie par exemple. Nous sommes à la disposition des médecins qui souhaiteraient travailler avec nous.
Exemple d’un bilan de base
Ces algorithmes peuvent apporter une valeur ajoutée considérable. Le bilan de base nécessaire pour établir la biologie des fonctions d’un individu est peu onéreux : moins de 120 euros. il comprend le dosage des globules rouges et blancs, les plaquettes, deux enzymes (CPK, LDH), une hormone (TSH US), un marqueur du métabolisme osseux (ostéocalcine), les phosphatases alcalines totales et leurs iso-enzymes (os, foie, intestins), le potassium, et le calcium.
La biologie des fonctions donne naissance à plus de 150 index, de structure comme de fonction, qui vont permettre :
d’évaluer le terrain physiologique d’un individu et ses risques à un instant T.
de déterminer les déséquilibres à l’origine de la pathologie et participant à ses modalités particulières
d’expression, en montrant comment les systèmes sont inter-reliés.
de suivre l’évolution physiologique du patient sous l’effet du traitement.
de détecter les effets positifs ou négatifs du traitement et la relation entre « maladie, traitement et patient ».
d’identifier de façon précoce le risque de récidive.
d’établir une vraie stratégie de prévention.
Ce système se situe au coeur de la médecine moderne et se présente comme un nouvel un nouvel outil d’évaluation intégrative du fonctionnement de l’organisme humain, à la disposition de tout médecin.